dimanche 9 décembre 2018
mercredi 14 novembre 2018
dimanche 21 octobre 2018
je vous partage ce texte écrie à cette occasion.
LIEURAN CABRIERES 2118
Il faisait très chaud en ce matin du 11 aout
2118, j’avais prévu ce petit pèlerinage depuis bien des années. Revenir, à
Lieuran, sur les traces de mes ancêtres était
un objectif que je m’étais fixé depuis le décès de mon père. Je voulais
découvrir aussi le village où avait grandi mon grand-père, ce lieu qu’il a tant
aimé nous raconter dans les réunions de famille. La vie qu’il avait eu dans son adolescence
avec sa sœur et mes arrières grands parents. Cette époque que j’enviais avait
bien changé avec le réchauffement climatique.
Je me garais à l’entrée du village, où les
bancs verts en métal avaient laissé place à des abris climatisés. Je regardais Nauriel,
petite colline qui à l’époque était riche d’oliviers et de palmiers. Le
propriétaire avait passé une partie de sa vie à la façonner en y plantant une
grande variété d’arbres. Aujourd’hui ce n’est plus qu’un caillou sec, sans
végétation, portant encore les traces noires du feu qui l’a consumée. Les
vignes à ses pieds ont laissé place à un champ de panneaux solaires.
Oui
depuis trois décennies avec le changement climatique qui avait écrêté trente
pour cent de la population mondiale, notre terre avait bien changé. Il aura
fallu cela pour comprendre que ce n’est pas elle qu’il faut sauver mais bien l’espèce
humaine.
C’est incroyable, il faut être face au
précipice pour que nous réagissions ! Tout notre mode de vie a basculé
dans l’ère propre : plus d’énergie fossile, plus de tabac, plus de
plastique. On partage les ressources à présent dans ce monde. Les industriels ont
trouvé moyen de rentabiliser tout çà. Il aura fallu un siècle et demi pour tout
détruire et nous savons qu’il nous faudra au moins cinq siècles pour retrouver
les conditions climatiques de cette époque. Qu’elle gâchis !
Je remontais à pied cette allée de platanes
qui avait perdu tous ses arbres avec les tempêtes qui sévissaient depuis
plusieurs décennies. Heureusement je disposais de mes lentilles connectées qui me
projetaient en temps réel les images du temps de mon grand-père, dans les
années 2018. J’imaginais le plaisir de mon grand-père et de sa sœur courant entre ces platanes pour aller prendre
leur bus ou descendre cette allée à vélo ou en trottinette dans l’ombre et la
fraicheur qui s’en dégageaient, avec la musique des cigales.
J’arrivais derrière l’ancienne école, elle
était devenue une salle des fêtes. Elle accueillait chaque année des manifestations
comme le théâtre, le loto, des lectures. Derrière l’école étaient projetés en
été, contre son mur, en plein air, des films. Se tenaient là aussi, le feu de
la Saint Jean, la fête des chasseurs et bien d’autre soirées.
Aujourd’hui même si ces bâtisses sont
entretenues toutes les générations depuis les années 2050 ont fui dans les
grandes métropoles pour y travailler. Le raisin à cette époque devenait trop
sucré à cause de la chaleur, cela a
causé sa disparition dans la région. Les viticulteurs se sont installés plus au
nord de la France.
Je vois toutes ces villas abandonnées. Elles
étaient tellement recherchées dans les débuts des années 2000 par des retraités
ou par des familles de toute la France qui y trouvaient la chaleur du midi.
Nous n’aurions jamais imaginé à cette époque que le Haut Nord ou la Belgique
deviendraient le sud méditerranée d’avant.
Je remontais la rue de la Fontaine : là se
trouvait la bibliothèque face à un petit parc. Cette commune était fière de ses
possibilités culturelles. Je me trouvai
maintenant devant cette petite église pleine de charme au centre historique du village. Elle pouvait
contenir au moins quarante personnes et chaque mariage ou baptême était un évènement
dans un village qui comptait moins de
trois cents habitants à cette époque.
La mairie se trouvait en face , sur une
petite place, elle arborait encore son blason «d'argent, au pairle losangé d'argent et de sinople ». C’est
là où mes arrières grands parents s’étaient
mariés.
Je continuais mon
chemin par une vieille ruelle passant sous une voute de pierres de chypre sur
laquelle s’élevait une maison, une construction typique de la région. Je
remontai maintenant l’avenue de la Serre dans la direction du cimetière. Là aussi se
trouvait en hauteur, un petit parc entouré d’une balustrade de pierres. C’était calme. J’imaginai
le chant des cigales dans ces années-là qui accompagnait les parties de
pétanque et le bon apéro qui suivait.
Les cigales ont
disparu depuis plus d’une cinquantaine d’années et la pauvreté des sols en eau a fait disparaitre la plupart des
végétaux. C’était sec, rocailleux maintenant, presque plus d’arbres. Je me
trouvais maintenant dans le cimetière, Il y avait des caveaux de famille qui pouvaient accueillir plusieurs générations. Les tombes n’étaient plus entretenues. A notre
époque presque tout le monde se fait incinérer. Mes arrières grands parents
avaient opté pour cette pratique-là, une sépulture cinéraire qui se trouvait
devant moi. Sans le vouloir ils avaient pris de l’avance sur notre époque.
Cette génération des années 2000 nous avait sensibilisé
sur l’évidente catastrophe écologique qui se préparait à cause du réchauffement
de la terre et de la pollution dans sa globalité. Ils l’avaient dit mais ils n’avaient
rien fait ! Si aujourd’hui ils étaient là ! Avec leur société de consommation aveugle à l’époque, comprendraient-t-ils
qu’il fallait agir dès 2018 pour le futur. Qui blâmer de cette époque qui nous
semble si loin maintenant. Ils étaient plus préoccupés par leur confort et leur
personne et n’avaient que faire de l’héritage qu’ils allaient nous léguer. C’ était une bombe à retardement écologique.
J’aime ce village où mon grand-père a grandi, J’aime cette
époque qui nous permettait encore de vivre en toute liberté. Lieuran-Cabriéres
a tant d’histoires à nous raconter, cela n’est peut-être qu’un début.
Frédéric Ortéga-Vaz
19/09/2018
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